A l’occasion de la rencontre « Pierre-Marie Bossan, un architecte symboliste, son influence dans la vallée du Rhône », ont été présentés sur table des plans numériques vectorisés et imprimés de l’architecte Xavier David concernant la restauration de l’église Notre Dame du Rosaire de Marseille ainsi que des plans du fond Joulie-Rey de cette même église. Ce rapprochement a permis de penser leur complémentarité en vue de la restauration de l’église.
Entretien de Xavier David
par Chantal Burgard
Architecte à Marseille et licencié en histoire de l’art, Xavier David, est chargé par les dominicains de la restauration de l’église Notre-Dame du Rosaire, construite entre 1868 et 1878, par Pierre-Marie Bossan, l’architecte de la basilique de Fourvière. Sa connaissance de l’iconographie dominicaine lui permet d’apprécier la valeur et finesse des décors, sculptures et peintures dont le thème principal est celui du Rosaire. Détails qui sont relevés et dessinés dans les plans numériques de son agence.
Les plans du fonds Joulie/Rey, une quarantaine concernant cette église, comporte des plans, des coupes et façades, et de nombreux détails de construction et de décor. Dessinés pour la plupart sur papier, à l’encre de chine en couleurs noire, rouge et bleu avec lavis, tracés fins, précis et côtés. Cependant, ces plans ne sont ni signés, ni datés. Selon l’historien Philippe Dufieux, spécialiste de Bossan, ils ne peuvent être de la main de Bossan, mais de ses collaborateurs.
…« Dans les plans d’archives, «on va chercher ce qu’on ne voit pas, ni sur les photos, ni sur les relevés de géomètre»…
Chantal Burgard : Vous présentez dans le cadre de cette conférence des plans numériques imprimés qui proviennent de votre agence. A quelle mission correspondent-ils ?
Xavier David: Les plans présentés sont des plans de diagnostic. Ils peuvent être utilisés pour la communication, dans le cadre de présentation à la maîtrise d’ouvrage ou de rencontres comme celle-ci. Ils sont dessinés en 2D. En 3D, cela aurait été une tâche trop complexe pour représenter tous les détails architectoniques et de décors. Ces plans de diagnostic numériques peuvent être ainsi utilisés par les entreprises pour écrire ou dessiner dessus.
CB: Que vous ont apporté les plans d’archives comme connaissance de la construction de l’église?
XD : Dans les archives, « on va chercher ce qu’on ne voit pas, ni sur les photos, ni sur les relevés de géomètre«. On découvre ainsi les systèmes constructifs qui ne sont pas visibles à l’œil nu, ce qui permet de faire des diagnostics structurels face aux désordres apparents. Ainsi, les murs de l’église ne sont pas en pierre de taille, ce qui aurait évité toutes ces fissures intérieures, mais sont constitués d’une maçonnerie et d’un parement extérieur en pierre taillées.
J’ai pu accéder à la correspondance entre le Prieur dominicain et JM. Bossan ainsi qu’aux bordereaux de chantier qui ont été très instructifs. Une riche documentation écrite car les dominicains sont des personnes méthodiques et cultivées. Mais aucun document graphique !
Par bonheur, l’archiviste des dominicains à Rome, un agrégé d’histoire d’origine lyonnaise avait une tendresse particulière pour Fourvière. Il avait donc collationné toutes les archives dominicaines de Marseille. J’ai donc bénéficié de la synthèse historique qu’il a faite de la construction de l’église, d’où la bonne surprise des archives Rey/Joulie, des plans de détails originaux qui ont précédé l’exécution.
Ces anciens dessins nous familiarisent avec la façon dont on dessinait au XIXe siècle : un dessin à la main dit beaucoup de choses et c’est une autre façon plus « ramassée » de représenter un projet, recherchée dans une économie du dessin.
Eglise ND du Rosaire Marseille, architecte Pierre Bossan (1868-1897) © fonds-joulie-rey
CB: Ces plans d’archives, qui sont des plans d’exécution, ont-ils été respectés dans la construction ?
XD : Oui parfaitement, ils l’ont été rigoureusement.
Baptiste qui a dessiné les plans numériques s’est appuyé sur ces plans d’archives dessinés très finement, côtés, et riches d’information sur les matériaux utilisés dans la construction, comme trois types de pierre. Ils ont été complétés grâce a l’observation des photos qu’il a » redressées ».
CB: Les plans présentés sont en noir et blanc et ont ainsi une force très graphique. La représentation des détails de modénature et sculpture représentés en 2D, en aplat, sans ombre, y ont une présence particulière. Pourquoi ce choix et pas la couleur ?
XD : Par opposition aux plans d’archives qui eux sont colorés ; cela leur donne un caractère plus contemporain. Ce choix va permettre de rajouter, par superposition, d’autres couches d’information, au fur et à mesure de l’avancement des études et du chantier qui va durer au moins six ans.